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Publié le 01/07/2014
La coopération sino-française dans l'enseignement

KONG QUAN

L'ancienne Université sino-française de Beijing, fondée en 1920. (CFP)

De mars 2008 à mai 2013, ce sont cinq années inoubliables que j'ai passées en France en qualité de dixième ambassadeur de Chine.

Au cours de mon mandat, que je sois à Paris ou à La Réunion, dans les métropoles animées ou dans les petits bourgs paisibles, j'ai eu l'occasion de voir de près l'intérêt que porte le peuple français à l'égard de la culture chinoise. J'ai en outre eu l'honneur de m'impliquer personnellement dans la préparation et le lancement d'importants programmes de coopération sino-français en matière de culture et d'éducation.

Des contacts de longue date

Du point de vue historique, les premiers échanges entre la Chine et la France remontent à bien longtemps.

À plusieurs reprises, Jean-Yves Le Drian, ministre français de la Défense, m'a fièrement indiqué que sa ville natale de Lorient avait été la première ville portuaire française à établir des relations maritimes avec la Chine, dès 1698. Par conséquent, j'ai tout spécialement pris le TGV direction Lorient, cette petite ville côtière de Bretagne. Parmi les collections du musée local, se trouvent un modèle réduit du premier navire parti pour la Chine cette année-là et des assiettes en porcelaine fabriquées sous le règne de l'empereur Kangxi. La conservatrice du musée, qui connaît sur le bout des doigts les pièces de l'exposition, a souligné que la ville de « Lorient » tirait son nom de ses précoces échanges commerciaux avec l'Extrême-Orient.

Un autre ami à moi, Bernard Brizay, qui travaille comme chroniqueur pour le journal Le Figaro, a également conté cette histoire en détail dans son livre La France en Chine, du XVIIe siècle à nos jours. Louis XIV a fait parvenir au moins deux lettres à l'empereur Kangxi, lui annonçant qu'il voulait envoyer plus de savants – comprenez bien sûr, des prêtres en soutane noire – à Beijing pour y transmettre de nouvelles connaissances. Un grand nombre d'archives historiques datant de la dynastie des Qing (1644-1911) témoignent du vif intérêt que nourrissait l'empereur Kangxi envers les sciences qu'apportaient les missionnaires occidentaux, à savoir le calendrier, les mathématiques, la géométrie et la géographie.

Retour sur ces échanges

Depuis lors, les échanges sino-français sur les plans culturel et éducatif ont évolué en lien étroit avec leur époque. Au XVIIIe siècle par exemple, les milieux intellectuels français ont commencé à s'intéresser particulièrement à la Chine : Voltaire a fait l'éloge du confucianisme, tandis que Victor Hugo a fustigé les atrocités commises par les forces alliées franco-britanniques en Chine. Au début du XXe siècle, de nombreux jeunes chinois sont allés en France, en quête d'une voie pour sauver la patrie en difficulté et la faire renaître de ses cendres.

Au cours d'une centaine d'années de batailles sanglantes et de lutte, bien des personnalités chinoises qui avaient participé en France au mouvement Travail-Études ont contribué au développement de la Chine moderne, que ce soit dans les domaines politique, économique, scientifique ou artistique.

En janvier 1964, Mao Zedong et le général de Gaulle, deux stratèges hardis et visionnaires, ont déclaré l'établissement des relations diplomatiques sino-françaises. Cette annonce a bouleversé le contexte des relations internationales dominé par la guerre froide et a initié le printemps de la coopération sino-française en matière de culture et d'éducation.

Au lendemain de l'établissement de ces relations, malgré les nombreux impératifs politiques qu'ils devaient gérer, les gouvernements chinois et français n'ont pas tardé à négocier la mise en œuvre d'échanges d'étudiants. En 1965, l'université de Rennes fut la première université française à accueillir des élèves chinois envoyés officiellement par l'État.

Ces étudiants chinois en France, une dizaine à l'époque, se comptent aujourd'hui, un demi-siècle plus tard, en dizaines de milliers, ce qui démontre incontestablement les brillants succès accomplis au fil de la coopération et des échanges sino-français. En 2013, dans presque toutes les universités françaises, en métropole comme dans les départements d'outre-mer, des Chinois sont inscrits au sein d'une centaine de cursus. Mais ce qui mérite d'être noté et suivi, c'est que la coopération et les échanges dans ce domaine ne cessent de se renforcer, et ce dans les deux sens : de plus en plus de jeunes Français volent vers la Chine pour consolider leur bloc de connaissances et alimenter leurs compétences d'innovation.

Une pléiade d'acteurs dans les coulisses

Pourtant, derrière ces succès éclatants se cachent un grand nombre de personnes qui contribuent dans l'ombre à cet aspect de la coopération sino-française.

Je pense par exemple à une enseignante de chinois, aujourd'hui retraitée à l'orée de ses 80 ans, qui vit dans le Sud de la France. Alors qu'elle était invitée à participer à une activité amicale, elle a confié en sanglotant qu'après vingt ans de retraite, elle était très reconnaissante envers la Chine qui n'oubliait pas le travail qu'elle avait fourni. Certes, elle ne fait pas partie de l'élite dans la sphère du chinois en France, mais à mes yeux, elle représente la profonde passion envers la Chine que cultivent les quelques centaines de Français qui enseignent le chinois.

Je songe aussi aux filles d'ethnie miao, qui avaient revêtu leurs plus magnifiques tenues et bijoux en argent pour m'accueillir lors de ma visite en Guyane française. Elles m'avaient expliqué, dans un français impeccable, que leurs ancêtres avaient quitté la province du Yunnan et étaient venus en France en passant par le Laos il y a 150 ans.

Je joins à mes pensées les jeunes bénévoles chinois qui popularisent le chinois dans les petites et moyennes villes françaises. Chaque année, près d'une centaine de volontaires sont envoyés en France par le Hanban (Bureau national pour l'enseignement du chinois langue étrangère) pour diffuser le charme de la langue chinoise à ceux qui veulent l'apprendre et ainsi rapprocher les deux peuples.

Je n'oublie pas les personnalités françaises qui ont mesuré l'importance de la coopération sino-française en matière de culture et d'éducation et qui s'y sont investies personnellement. Valéry Giscard d'Estaing, ex-président français, qui, malgré ses 80 printemps, continue d'étudier le chinois ; Jacques Chirac, aussi ex-chef d'État, qui est incollable sur l'histoire de la Chine ; et l'épouse de l'ex-premier ministre Jean-Pierre Raffarin qui se consacre à l'apprentissage du chinois au Centre culturel de Chine à Paris, où jamais elle ne manque le moindre cours.

Enfin, je pense particulièrement à ces dizaines de milliers de professeurs français qui, depuis 50 ans, donnent cours à des élèves chinois et sont fiers de la performance de ces derniers, ainsi qu'à la centaine de milliers de familles françaises qui, depuis 50 ans, prennent soin des étudiants chinois à l'étranger.

En 2010, les chefs d'État chinois et français ont convenu de conjuguer leurs efforts pour que d'ici 2015, le nombre d'élèves chinois en France passe à 50 000, et celui des élèves français en Chine, à 10 000. Cet objectif sera probablement atteint plus tôt qu'ils ne l'envisageaient, ce qui souligne les belles perspectives d'avenir qu'affiche la coopération sino-française dans les champs culturel et éducatif.

Je suis convaincu que la coopération sino-française fructueuse dans ces domaines éclairera de mille feux la commémoration du cinquantenaire des relations diplomatiques sino-françaises.

*KONG QUAN est directeur adjoint du Bureau des affaires étrangères relevant du Comité central du PCC, ainsi qu'ancien ambassadeur de Chine en France.

 

Source: La Chine au présent

 



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