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Publié le 01/06/2015
Les relations sino-européennes au-delà de la distance

Chen Yang

 

L'histoire des relations diplomatiques entre la Chine et l'Europe débute en 1974, lorsque Sir Christopher Soames, alors vice-président de la Commission en charge des Affaires étrangères de la Communauté européenne, invite l'ambassadeur de Chine à dîner dans sa résidence personnelle. Un an plus tard, Soames se rend en Chine et signe à Beijing un accord pour la mise en place de relations diplomatiques sino-européennes. Dès lors, des contacts et des échanges directs furent établis de part et d'autre du continent eurasiatique et des coopérations initiées dans de nombreux domaines. Contre vents et marées, par-delà les montagnes, la Chine et l'Europe n'ont cessé pendant ces 40 années de se rapprocher.

40 ans de relations diplomatiques

Il y a 40 ans, l'Union Européenne (UE) s'appelait encore la Communauté européenne, mais elle se distinguait déjà comme étant un rassemblement de pays riches, prospères et développés. La majeure partie de sa population possédait d'ailleurs des appareils électriques, dont les Chinois ignoraient pour la plupart l'existence. Il y a 40 ans, la Chine essayait de sortir de la pauvreté. Elle aspirait à une vie prospère et souhaitait attirer les capitaux et les technologies.

40 ans se sont écoulés et l'Europe n'est aujourd'hui plus que l'ombre d'elle-même, avec une industrie vieillissante, une compétitivité en berne, une intégration brouillée et un système social pris au piège d'une expansion pernicieuse. La Chine est quant à elle devenue le nouvel « atelier du monde », vers lequel elle a exporté ses nombreux produits « Made in China ». Ses investissements à l'étranger se sont multipliés et les technologies, notamment au niveau des TGV et des télécommunications, figurent en bonne place sur sa nouvelle carte de visite. Signes des temps, au salon des technologies de l'information et de la bureautique (CeBIT) de Hanovre, c'est Jack Ma, le fondateur d'Alibaba, qui s'est fait cette année le porte-parole des entrepreneurs du monde entier. Et à Milan, le pavillon de la Chine est le plus grand de l'exposition universelle. L'Europe connaît un engouement croissant pour l'apprentissage du chinois et de plus en plus d'Européens viennent en échange en Chine. La distance n'est pas un problème et le prix du billet d'avion n'est plus un obstacle. C'est en Chine que bat aujourd'hui le cœur de l'économie mondiale et le pays regorge d'opportunités de développement.

Ces 40 années ont inexorablement transformé le rapport de force entre la Chine et l'Europe. On est cependant loin du principe qui consiste à « enseigner à l'apprenti pour affamer le maître » : les relations sino-européennes témoignent aujourd'hui d'une tendance à l'équilibre, d'une émulation collective et d'une situation mutuellement bénéfique. L'approfondissement de l'ouverture et de la réforme devrait permettre à  la Chine de se développer encore davantage. Par ailleurs, l'urbanisation et l'économie verte ont apporté un nouvel espace de développement à la coopération, sécurisé par la légifération et la standardisation du marché chinois. Dans le sens inverse, les capitaux chinois se tournent désormais vers l'Europe. Les industries chinoises y achètent des entreprises, favorisant un renversement dans la tendance au déséquilibre de la balance commerciale, et le développement des industries a permis d'injecter une vigueur nouvelle. Depuis 40 ans, le développement des relations commerciales entre la Chine et l'Europe a connu un effet boule de neige. De 2,4 milliards de dollars US à ses débuts, le volume des échanges commerciaux atteint aujourd'hui les 600 milliards de dollars et vise les  1 000 milliards pour 2020. Les Européens, en entrepreneurs sensés et rationnels, ne manqueraient pour rien au monde les opportunités offertes par le développement de la Chine.

Une coopération qui dépasse le contexte bilatéral

L'épanouissement des relations sino-européennes résulte d'une transformation dans la situation mondiale et constitue une force motrice dans l'évolution du nouvel ordre international. Depuis les années 70, les interactions entre la Chine et l'UE sont devenues chaque jour plus importantes et le niveau de coopération n'a cessé de croître. A partir des années 2000, la situation internationale a connu de profonds changements. L'Europe et les Etats-Unis ont dû faire face à une crise économique et à une crise de la dette durables, et les disparités de développement s'accentuèrent. Le regard que portait l'Europe sur la Chine commença doucement à évoluer. A partir de 2001, la Commission européenne publia plusieurs documents intitulés « Stratégie de l'UE face à la Chine », « Vers une maturité des partenariats - Intérêts et challenges communs dans les relations sino-européennes », ou encore « La Chine et l'UE : un partenariat plus étroit, des responsabilités plus nombreuses » et « Concurrence et partenariat : le commerce entre l'UE et la Chine et les mesures d'investissements ». La Chine n'était plus seulement vue comme un partenaire économique majeur, mais également comme un allié important dans le système international.

La réforme et le développement de la Chine constituent une opportunité pour le monde entier, mais ses relations avec l'Europe comportent une énergie particulière : dans le cadre des Nations unies, la Chine et l'Europe partage une responsabilité commune pour préserver la paix mondiale, éradiquer la pauvreté et réaliser un développement durable. Au sein du G20, elles se sont unies pour lutter contre la crise financière et relancer la croissance économique mondiale. Face aux nouveaux enjeux sécuritaires non-traditionnels, comme le changement climatique, le terrorisme ou la cybersécurité, elles ont prôné une coopération pragmatique et permis au nouvel ordre sécuritaire international de réaliser d'importants progrès. Après de prudentes considérations, l'Europe s'est également jointe aux opérations de la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (AIIB) et elle vota pour la réforme de l'ordre économique international prônée par la Chine. Tout cela laisse à penser que la Chine, en tant que représentant des économies émergentes du monde entier et coopérant avec le plus grand ensemble économique au monde, sera un élément déterminant dans l'évolution de la structure économique mondiale.

Une coopération pour le bien de l'humanité

Ces dernières années, grâce aux efforts conjoints des dirigeants chinois et européens, le développement sur tous les plans des relations sino-européennes s'est encore accéléré.

En novembre 2013, les deux parties ont conclu un « Agenda stratégique de coopération Chine-UE ». Lors de sa visite en Europe au début de l'année 2014, Xi Jinping proposa l'élaboration de grands partenariats pour « la paix, la croissance, la réforme et la civilisation ». Il proposa également une feuille de route détaillée pour le développement global des relations futures entre la Chine et l'UE. Les investissements chinois en Europe connaissent une croissance rapide. Pour les deux premiers mois de 2015, la partie continentale de la Chine a investi près de 3,4 milliards de dollars US en Europe, soit près de 10 fois plus que l'année précédente pour la même période. La question de la balance commerciale avec la Chine n'est ainsi plus d'actualité. Les négociations sur le traité d'investissement bilatéral Chine-UE, ainsi que les négociations pour la mise en place éventuelle d'une zone de libre-échange, marquent l'étendue et la profondeur des relations commerciales existant entre la Chine et l'Europe.

Aujourd'hui, alors que la Chine poursuit activement son projet de Routes maritime et terrestre de la Soie, l'UE lance également une initiative similaire de développement, visant à promouvoir la croissance et l'emploi, dont la conjonction pourrait permettre de multiplier les résultats. Le développement futur des relations sino-européennes sera mutuellement bénéfique. Le marché chinois permettra à l'Europe de sortir du marasme économique dans lequel elle se trouve actuellement, et de réaliser une plus grande intégration. Parallèlement à cela, l'expérience européenne pourrait permettre à la Chine de passer outre le piège des moyens revenus et de devenir une véritable économie de hauts revenus.

Le développement des relations sino-européennes pourrait également bénéficier à l'ensemble de l'humanité. Sur le plan économique, l'interconnectivité pourrait servir de lien sur le continent eurasiatique, combinant les technologies et services de l'UE et les clusters industriels de la Chine, réalisant une croissance équilibrée et inclusive, et créant un nouveau moteur pour le développement économique mondial. Sur le plan politique, la Chine et l'Europe peuvent s'accorder sur un principe d'intégrité en faveur de la paix, du développement et de la mondialisation, afin de rendre le monde un peu moins violent et d'offrir une sorte de « double assurance » pour la paix dans le monde. Sur le plan culturel, la promotion des échanges entre les peuples, et particulièrement entre les jeunes générations, permettrait de faire fondre les préjugés et de créer des fondations solides pour une coopération durable et stable entre la Chine et l'Europe. Ainsi serait-il possible de bâtir de meilleurs lendemains pour l'humanité.

L'attitude, que portent la Chine et l'Europe l'une envers l'autre, a subi de subtils changements. Les challenges enfouis dans les couches profondes de leurs relations continueront de se manifester et les audits de la structure industrielle chinoise, ainsi que le ralentissement économique européen, renforceront probablement leur concurrence sur les marchés étrangers. A cela s'ajoutent une confiance mutuelle qui n'a pas évolué et des préjugés historiques toujours d'actualité. C'est la raison pour laquelle, les deux parties doivent avoir une attitude plus tolérante et prendre leur mal en patience.

Les 7 970 kilomètres, qui séparent Bruxelles de Beijing, se font encore sentir. C'est la raison pour laquelle il n'existe entre eux ni conflit territorial, ni démonstration de force géopolitique : le fossé qui les sépare est suffisamment grand. Il a fallu 40 années pour enfin faire tomber les chaînes de l'ancien ordre international, de sortir du sillon tout tracé et de se diriger progressivement vers un pieds d'égalité. Cependant, cet espace qui les sépare offre suffisamment de place aux investissements communs, à la coopération et au développement, et au bout du compte, leurs envies réciproques de paix et de progrès sont relativement proches.

 

L'auteur est assistant chercheur au département Europe de l'Institut de Chine des Relations internationales modernes.

 

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