Des milliards pour sauver le lac
Pour réunir les fonds destinés à la réalisation dudit projet, les pays membres de la CBLT vont devoir compter sur plusieurs pays partenaires que sont l’Angola, le Soudan, l’Algérie, l’Égypte, le Maroc, la Libye ainsi que ceux de pays des autres continents comme les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Chine, le Canada et les Pays-Bas.
Sur cet aspect, Samuel Nguiffo, redoute le désistement de certains États. « Aucun des pays concernés n’est riverain du lac, donc n’est directement concerné par la disparition du lac. Et là on risque de faire face à quelques réticences, notamment de la part des pays qui seront invités à fournir les eaux de leur fleuve pour approvisionner le lac. Mais on n’en est pas encore là. »
Et si le projet d’approvisionnement en eau n’arrivait pas à prospérer, l’environnementaliste camerounais n’occulte pas sa crainte que des conséquences graves puissent en découler : « si le lac disparaissait, ce serait une catastrophe, avec une forte inactivité dans la zone, ce qui serait extrêmement dangereux. Parce que si ces personnes n’ont pas d’espoir ou de possibilité de produire et de gagner de l’argent, s’ils n’ont pas la possibilité de subvenir à leurs besoins alimentaires, on aura là un vivier qui pourrait être exploité pour des activités terroristes à très bas coût. »
Le lac Tchad est d’un intérêt stratégique immense pour toute la région. Et si rien n’est fait, le lac pourrait disparaître d’ici 2020. Une catastrophe pour les près de 40 millions d’âmes dans les quatre pays limitrophes qui dépendent des eaux de ce lac pour leur survie. Cependant, certains experts réunis lors de la CBLT en janvier dernier à Maroua au Cameroun ont pointé du doigt la responsabilité des différents États riverains dans la dégradation du lit du lac, du fait de nombreuses interventions de projets camerounais et nigérians dans sa périphérie. On cite à ce propos la retenue d’eau causée par la digue de Maga du Cameroun, qui prive le lac Tchad d’une partie importante de ses eaux. Quatre ou cinq opérations de ce genre sont présentes autour du Nigéria.
Néanmoins, s’il se concrétise, ce transfert d’eau aura des retombées socio-économiques importantes, il permettra l’extension du réseau électrique des deux Congo, la construction de barrages à buts multiples, l’augmentation des capacités hydroélectriques et le réglage des problèmes d’étiage de l’Oubangui, ainsi que la possibilité de la construction d’un port à Garoua au Cameroun, qui va relier Port Harcourt au Nigéria.
Reportage réalisé à Maroua, au Cameroun