Le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg et son épouse ont récemment déclaré à San Francisco qu'ils allaient donner 3 milliards de dollars dans les dix ans à venir pour aider à « guérir, prévenir ou contrôler toutes les maladies d'ici la fin du 21e siècle ».

Selon le jeune milliardaire, son projet ne vise pas à garantir que l'homme ne sera jamais malade, mais à trouver des traitements contre toutes les maladies, ou à défaut, à pouvoir traiter celles qui sont à l'heure actuelle mortelles.

Ces dernières années, les milieux scientifiques n'ont cessé de se concentrer sur la santé et les soins médicaux. Microsoft projette de recourir à l'intelligence artificielle dans la lutte contre le cancer ; Google collabore avec le NHS britannique pour effectuer de meilleurs diagnostics à l'aide des techniques informatiques ; et IBM a créé avec le MIT américain le laboratoire BM3C visant à aider les médecins à soigner les personnes âgées et les handicapés.

L'ambition de ces magnats est basée sur les percées incessantes dans les techniques d'avant-garde et le bon usage de résultats scientifiques. Mais deux questions se posent : où est la limite des sciences ? La réalisation de leurs ambitions est-elle vraiment bonne pour l'humanité ?

Eliminer toutes les maladies rapellent évidemment « la vie éternelle », un concept souvent abordé dans les romans de science-fiction. Si le recours aux méthodes scientifiques porte ses fruits, il sera facile de prolonger la vie humaine jusqu'à 100 ans ou même à 200 ans. Cependant, une série de problèmes sociaux s'ensuivront.

D'abord, la sélection naturelle est incontournable. A l'heure actuelle, les principales causes de décès sont le cancer, les épidémies, et les maladies cardiovasculaires et du système nerveux, qui sont en grande partie héréditaires. Pas mal de scientifiques et de médecins sont partisans d'une telle idée : « Les maladies qui grignotent la vie humaine font aussi partie de la sélection naturelle ».

Selon la théorie de Mendel, un caractère ne disparaîtra jamais s'il est simplement transmis en tant que dominant. Et la sélection naturelle permet de faire augmenter la présence d'un bon gène dans sa population.

Si les maladies héréditaires deviennent guérissables grâce au progrès scientifique, les gènes en la matière risqueront de s'amplifier sans cesse dans l'espèce humaine. C'est cruel mais cela mérite une réflexion profonde, à moins que l'on n'arrive un jour à modifier radicalement les mauvais gènes. Dans ce cas, l'homme clôné sera un nouveau risque éthique.

De plus, avec l'amélioration du niveau de vie, l'homme est en proie à des maladies dont il est lui-même l'initiateur, comme l'obésité due à l'absence d'activité physique et les maladies liées au tabac et à l'alcool. Pourrait-on vraiment les éliminer en comptant seulement sur les progrès médicaux ? Si la réponse est oui, l'homme sera-t-il encore capable de maintenir un mode de vie sain et d'éviter de s'autodétruire physiquement (par exemple par la drogue) ?

La lutte contre les maladies et l'allongement de l'espérance de vie ont aussi conduit à une ère d'explosion démographique. Depuis les débuts de la révolution industrielle, la durée de vie moyenne n'a cessé de se rallonger avec les progrès scientifiques. Il en résulte des pressions grandissantes sur l'emploi, l'environnement et la compétition croissante pour les ressources médicales.

Même si nous pouvons trouver un nouvel espace vital sur une autre planète, la distribution des intérêts politiques et économiques en la matière sera un casse-tête sans précédent. De ce fait, on ne peut pas dire que l'avenir de l'homme sera radieux même si toutes les maladies sont vaincues.

« Il faut éviter de placer la science au-dessus des autres savoirs ! ». Selon la « Déclaration sur les concepts scientifiques » publiée en 2007 par l'Académie des sciences de Chine, toutes les initiatives scientifiques devront être réglementées au niveau éthique et juridique.

La science est belle mais pas dans l'absolu. Le développement scientifique est toujours graduel et en mouvement, qu'il s'agisse du géocentrisme, de l'héliocentrisme, des lois de Newton, ou de la théorie de la relativité. Presque toutes les découvertes scientifiques finissent par être jugées « relativement correctes dans des conditions données ».

Certes, la déclaration de M. Zuckerberg et son épouse symbolise une avancée humaniste et scientifique. Investir des sommes importantes dans la recherche médicale est une bonne chose pour tous les habitants du village planétaire. Mais il est nécessaire de réaliser des progrès correspondants au niveau de la prise de conscience, de la répartition des intérêts et de l'éthique sociale pour que leurs ambitions profitent vraiment à l'humanité.