Su Yiming participe à la finale de la Coupe du monde de big air pour hommes au Steamboat Resort (Colorado), le 4 décembre 2021.
Une recherche sur le nom Su Yiming dans Baidu produit plus de 7 millions de résultats. Le snowboardeur adolescent a fait des vagues dans le milieu du ski ces dernières années, d’abord parce qu’il est devenu le premier snowboardeur chinois à réussir un « Cab (Caballerial) 1800 », et plus tard le premier au monde à terminer un « Bs 1980 Indy Crail », une figure incroyablement difficile. Mais il s’est d’abord retrouvé sous le feu des projecteurs en tant qu’enfant-acteur, interprétant le rôle de Shuanzi dans La bataille de la montagne du Tigre, un film de 2014 réalisé par Tsui Hark. Peu de gens s’attendaient à ce qu’il devienne l’un des snowboardeurs les plus prometteurs au monde quelques années plus tard.
Passionné depuis l’enfance
Su Yiming est né en 2004 dans la province du Jilin, qui connaît de longs et rigoureux hivers. Tous deux fans de snowboard, ses parents l’ont initié à ce sport quand il avait environ quatre ans. Les snowboards pour enfants n’étaient pas disponibles en Chine à cette époque, il a donc utilisé une planche pour adultes, qui était plus grande que lui !
Le petit garçon est immédiatement tombé amoureux de ce sport et a consacré tout son temps libre à le pratiquer. Il se levait tôt le matin, terminait ses devoirs aussi vite que possible et se dirigeait vers les montagnes malgré les risques d’engelure. Il s’est rapidement taillé une réputation dans le milieu du snowboard et a été sponsorisé par une marque de snowboard de renommée mondiale dès l’âge de sept ans.
Cette prouesse sportive lui a également valu un rôle dans La Bataille de la montagne du Tigre, un film sur l’armée dirigée par le Parti communiste chinois exterminant des bandits dans les montagnes enneigées du Nord-Est de la Chine dans les années 1940. L’équipe de tournage avait besoin d’un enfant de son âge qui puisse skier plus vite que les adultes dans l’une des scènes. Le réalisateur a compris que Su Yiming était fait pour ce rôle après avoir regardé une vidéo de lui.
Après avoir fait ses débuts dans ce long métrage, le jeune garçon est apparu dans d’autres films et séries, tels que Rock Kid, A Splendid Life in Beijing et The Wolf.
De retour sur les pistes de neige
En 2015, Beijing et Zhangjiakou ont été élues villes-hôtes des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver 2022. Cela a incité Su Yiming à repousser ses limites en snowboard. « En apprenant que les Jeux d’hiver se tiendraient à Beijing, j’ai rêvé d’y participer. Mais pour me qualifier, j’avais besoin de résultats dans des compétitions professionnelles. Donc, à partir de ce moment, j’ai décidé de devenir snowboardeur professionnel, car c’était la seule façon de participer à ces compétitions », explique-t-il.
En fait, il figurait sur la liste des candidats pour l’équipe nationale chinoise de snowboard grâce à la recommandation d’un entraîneur japonais qui l’avait formé en 2012.
Le jeune sportif a officiellement été admis dans l’équipe nationale en 2018. L’année suivante, il a remporté la finale du slopestyle au New Zealand Freestyle Open Rookie Fest 2019, organisé au Cardrona Alpine Resort, en Nouvelle-Zélande. Pour ce faire, il a battu de nombreux athlètes de renommée internationale, dont il avait lui-même appris en regardant des vidéos de leurs performances.
Ce championnat a renforcé la confiance de l’adolescent en ses capacités. « Rivaliser avec eux était une grande joie en soi. J’étais certain de terminer mon run, mais je ne m’attendais pas à gagner l’or. J’étais absolument ravi à ce moment-là. La victoire a été une affirmation de soi et elle a été un bon présage pour ma carrière de snowboardeur », confie l’athlète, en se remémorant son premier championnat international.
Établir des records
Au cours des années suivantes, Su Yiming a remporté plus de récompenses et établi plus de records. En 2020 et 2021, il a raflé toutes les médailles d’or dans les épreuves nationales de slopestyle et de big air. En mars 2020, il est devenu le premier snowboardeur chinois à réussir le « Bs Triple Cork 1620 Mute ». En janvier 2021, il est de nouveau entré dans l’histoire du snowboard chinois en accomplissant un « Cab 1800 ». En octobre de la même année, il est devenu la première personne au monde à terminer une figure folle appelée « Backslide 1980 Indy Crail », en Autriche. À ce jour, le nombre de personnes capables d’effectuer cette figure se compte sur les doigts d’une main, et Su Yiming est la plus jeune d’entre elles.
« Je pense que le niveau général des snowboardeurs chinois s’améliore. Ce sport est relativement nouveau en Chine et nous sommes à la traîne à l’échelle mondiale. Il ne semblait pas possible de rattraper ce retard. Après avoir choisi de devenir un sportif professionnel, j’ai essayé de suivre leurs pas [ceux des meilleurs snowboardeurs du monde]. Mes objectifs étaient ceux qu’ils avaient atteints il y a cinq ou dix ans, mais j’ai progressé étape par étape », explique le jeune prodige. « Je consacre beaucoup d’énergie et de temps à l’entraînement et je continue de m’améliorer. À présent, je suis à leur niveau. »
Viser haut
Su Yiming suit un programme exténuant. Lors de la séance d’entraînement dans les monts Changbai dans le Nord-Est de la Chine, il était toujours le premier arrivé sur le terrain, afin de profiter de deux ou trois heures de travail supplémentaires. Il a également augmenté l’intensité de ses entraînements et a tenté plus de nouvelles figures. Cette intensité l’a amené à casser plusieurs snowboards en une seule semaine.
Le jeune athlète est encore plus exigeant envers lui-même que son entraîneur. « Je suis le seul à savoir si je suis à un niveau satisfaisant. C’est difficile à exprimer avec des mots. L’ensemble du processus, du saut à l’atterrissage, se joue sur tellement de détails. La façon dont la figure est vue par les spectateurs et la façon dont je la perçois peuvent être différentes, et cette dernière est la plus importante. Je vais répéter les mouvements jusqu’à ce que je sois complètement satisfait de moi-même », explique-t-il.
La communication avec les entraîneurs est importante pour les sportifs, surtout lorsque les premiers viennent de pays différents. Su Yiming parle couramment l’anglais et le japonais et n’a donc aucune difficulté pour échanger avec les entraîneurs étrangers.
« Bien sûr, j’ai besoin de parler avec mon entraîneur de problèmes techniques clés, mais le plus important est de consacrer de l’énergie et du temps à étudier un trick [une figure] et à le pratiquer. Je travaille généralement sur un nouveau mouvement pendant six heures par jour, et il faut parfois tout un été pour maîtriser un trick », détaille-t-il. Mais il ajoute qu’il ne poussera pas son corps ni son esprit au-delà de leurs limites respectives. Ayant maîtrisé les figures les plus difficiles existant à ce jour, il ne voit pas la nécessité d’en affronter de plus ardues encore. Son objectif est plutôt d’assurer une performance stable quand il exécute ces figures.
Su Yiming a dit un jour sur Weibo qu’il aimait la sensation de voler. Mais actuellement, il n’a pas le temps de savourer cette sensation tout en effectuant une figure compliquée. « Quand je réalise un mouvement simple, je n’ai pas besoin d’y penser beaucoup, et je peux regarder autour de moi ou vers le ciel. Mais quand il s’agit d’un mouvement difficile, je dois être concentré sur le moindre détail. »
Un intérêt intact pour le cinéma
La passion de Su Yiming pour le snowboard a grandi au cours de la dernière décennie, lorsqu’il s’est entraîné et a concouru en tant qu’athlète professionnel. « Quand j’étais amateur, je regardais des vidéos pour étudier les mouvements du snowboard. En tant que professionnel, je dois non seulement regarder des vidéos de moi-même et des autres concurrents, mais aussi étudier les mouvements et les tactiques [pour m’améliorer]. J’adore le snowboard et j’y travaillerai toujours », affirme-t-il.
Su Yiming s’est essayé au ski lors du tournage de La bataille de la montagne du Tigre, comme l’imposait son rôle. Mais il pense que le snowboard est plus cool. Il a écrit un jour sur Weibo qu’il aimerait partager son temps entre l’école, le cinéma et le snowboard. Mais pour l’instant, il est engagé à 100 % dans le sport en vue des Jeux olympiques d’hiver de Beijing.
« C’est un grand honneur pour moi d’y participer. Je ressens de la pression ainsi qu’une grande motivation, car je sais que beaucoup de gens me regardent et me soutiennent, et qu’ils ont des attentes envers moi. C’est une opportunité rare pour moi et pour le snowboard. Je vais tout donner pour les Jeux. Quel que soit le résultat, je n’aurai aucun regret tant que je fais de mon mieux », avance-t-il.
Enfant typique de la génération Z, Su Yiming est actif sur les réseaux sociaux, interagissant avec d’autres champions du snowboard dans le monde : « Les snowboardeurs sont comme une grande famille. Nous sommes rivaux dans les compétitions, mais amis hors des pistes. Je suis plus qu’heureux de voir d’autres snowboardeurs commenter mes publications et la Fédération internationale de ski partage mes vidéos sur son compte officiel. »
Pour ce qui est de l’avenir, l’adolescent envisage de poursuivre ses études en parallèle avec sa carrière sportive. Il recommencera également à jouer dans des films et séries télé. « Je souhaite m’épanouir dans différents domaines, et que les gens me voient sous plusieurs éclairages : snowboardeur, acteur ou étudiant. Quoi que je fasse, je m’y consacrerai à fond. On ne peut mener quelque chose à bien que lorsque l’on fait de son mieux », philosophe-t-il.
*CAO YAQI est journaliste à Titan Sports.
