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Boualem Sansal, la force de la radicalité

Jacques Fourrier  ·  2017-03-23  ·   Source: Beijing Information
Mots-clés: Boualem Sansal; Fête de la Francophonie

Boualem Sansal

Le romancier et essayiste algérien Boualem Sansal était en Chine au mois de mars pour participer à la Fête de la Francophonie et animer pendant une dizaine de jours une série de rencontres à Beijing, Changchun, Guangzhou et Shenzhen. Son dernier roman « 2084 », qui a reçu le Grand prix du roman de l’Académie française en 2015, vient d’être publié en chinois aux éditions Sea-Sky.

Boualem Sansal fait son entrée dans les librairies de Chine avec « 2084 », traduit par le spécialiste chinois de la culture francophone Yu Zhongxian. Une reconnaissance tardive pour cet écrivain doublement récompensé en 1999 par le prix du Premier roman français et le prix Tropiques pour « Le Serment des barbares ». Depuis, il écrit des ouvrages sombres et désespérés dans lesquels il se lance dans une entreprise méticuleuse de déconstruction, mettant à nu la domination symbolique exercée par le discours et l’idéologie, fussent-ils laïcs ou religieux. Au désespoir s’ajoute le tragique avec le constat d’une société éclatée, violente, corrompue, qui contemple l’abîme sans savoir que la chute a déjà commencé.

Un écrivain inclassable

Boualem Sansal fait partie de ces gens dont le contact peut séduire ou hérisser tant leur discours est empreint d’une radicalité d’une autre époque. Point de relativisme ou de nihilisme, point de petits accommodements avec la réalité ou de sophismes érigés en dogme, mais une plume sans concession. Derrière ce visage de vieux sage, avec sa chevelure blanche nouée en catogan, cet homme affable et souriant paraît inclassable. « Tous mes livres s’inspirent d’un grand écrivain… Je ne raconte pas d’histoire, je travaille sur des thèmes. Mon premier livre portait sur la violence dans la société – la violence forte, pas la petite violence quotidienne – et je vais lire tous les auteurs et choisir celui qui selon moi traite [le thème] sous le meilleur angle et de la manière la plus intelligente, la plus littéraire, et il me servira de fil directeur. C’est ma façon de travailler, pour tous les romans. »

Ainsi, dans son roman « Le Village de l’Allemand » qui l’a consacré à l’échelle internationale en 2008 et lui a valu le Grand prix de la francophonie remis par l’Académie française, Primo Levi a été sa source d’inspiration. « C’est un auteur que j’aime particulièrement. Il a fait une analyse du nazisme absolument extraordinaire. » Devant des monuments de la littérature mondiale, l’écrivain doit donner le meilleur de lui-même. « La difficulté quand on prend pour fil directeur des écrivains aussi importants, c’est de rester à leur niveau et amener à la réflexion quelque chose de plus, sinon, cela ne sert à rien. »

De même, dans son dernier roman qui s’inspire de « 1984 », Boualem Sansal a voulu recréer un univers dystopique post-apocalyptique qui trouve une résonnance contemporaine. « George Orwell a travaillé sur le système totalitaire mais je pense que le temps des systèmes totalitaires étatiques est terminé et on entre dans un nouveau système totalitaire beaucoup plus dangereux parce qu’insaisissable. C’est le système totalitaire religieux. » A la différence des dictatures du XXème siècle, localisables et identifiables comme Hitler et l’Allemagne, Staline et l’URSS, les nouveaux systèmes totalitaires sont diffus, insurmontables, invincibles. Il prend l’exemple de la finance internationale. « C’est un système totalitaire, mais qui va-t-on attaquer ? Des banques, des gros capitalistes ? Ce sont des gens comme vous et moi. » De même pour le religieux. « Le Prophète, Dieu, c’est absolument inaccessible. » Boualem Sansal relève l’ironie de cette évolution. Voyant en effet arriver ce nouveau totalitarisme contre lequel il est désarmé, le citoyen veut retourner au totalitarisme étatique. « Entre la peste et le choléra, on préfère le choléra. Un peu partout, on a des gouvernements totalitaires, très directifs, pour protéger la population. La population veut cela alors que depuis le XIXème siècle, on s’est battu contre ces systèmes et qu’on les a abattus avec la démocratie. »

Boualem Sansal donne l’impression de critiquer la religion dans son dernier roman, ce qu’il réfute. « La religion est une croyance, les gens croient en ce qu’ils veulent. Ce que je déplore, c’est que la religion est dans une démarche de conquête, elle veut le pouvoir, tout simplement. » Il constate qu’il a fallu mener des siècles de combats pour que la religion sorte du champ politique et culturel et que l’homme se dote des outils scientifiques et rationnels pour assurer sa survie. « Ce n’est pas Dieu qui va nous sauver du changement climatique, lance-t-il. L’homme doit être libre et rationnel et se préparer à affronter les problèmes concrets de demain. » Il ajoute que la religion ne peut pas être un système de gouvernement dans un contexte de mondialisation et de problématiques nouvelles. « On a toujours travaillé les uns contre les autres pour résoudre des problèmes locaux. Il faut maintenant travailler ensemble. Mais la religion nous empêche de réfléchir, elle nous donne un prêt-à-penser, elle nous empêche d’avoir l’esprit libre pour résoudre les problèmes de demain. »

Dans « 2084 », Boualem Sansal reprend la trame de « 1984 » : Ati, le personnage principal, tente de se libérer progressivement du carcan totalitaire. « C’est très difficile de savoir que l’on vit dans un système totalitaire si on y est né. Il faut donc des circonstances particulières pour qu’on découvre que l’on est dans un système qui n’est pas normal. » Boualem Sansal s’intéresse à ce point d’inflexion à partir duquel un individu s’interroge sur son mode de pensée. « Cela ne se produit jamais, c’est très rare. Nous allons vieillir et mourir sans changer de mode de pensée. Orwell s’était posé la question de savoir comment la prise de conscience allait s’opérer chez Winston. C’est l’amour. » Dans « 2084 », c’est la découverte d’un secret qui va changer la vie d’Ati. Lui qui a été éduqué dans l’idée que le monde avait toujours été le même depuis des temps immémoriaux découvre la supercherie.

Boualem Sansal se défend de faire passer un quelconque message dans ses livres. « Les livres à message sont des livres très dangereux. Je ne suis pas un idéologue. Ce sont les idéologues ou les prédicateurs qui délivrent des messages. Le prophète Mahomet, on l’appelle le Messager. Si vous avez un message, vous allez devenir un gourou et autour de vous va se monter une secte. »

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